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Voici un résumé, pas très résumé, d'une très grosse méta-analyse assez connue sur les déficits langagiers d'enfants ayant une histoire familiale de dyslexie. Les enfants ont été testés avant l'apprentissage du langage écrit pour voir si le déficit langagier était endophénotypique à la dyslexie (si vous voulez apprendre ce nouveau mot, lisez la suite :))
TagsTSLE, TDL, dyslexie
Titre originalOral Language Deficits in Familial Dyslexia: A Meta-Analysis and Review
AuteursSnowling Margaret J., Melby-Lervåg Monica
Date de publication2016
RevuePsychological Bulletin 2016, Vol. 142, No. 5, 498 –545
Lien Sourcehttp://dx.doi.org/10.1037/bul0000037

Disclaimer: Toutes les références complémentaires incluses dans les articles sont des références issues de l’article initial que j’ai choisi d’inclure pour les personnes souhaitant aller plus loin dans leur recherche. Il ne s’agit pas d’articles que j’ai personnellement lus. Ces références complémentaires seront placées dans une bibliographie secondaire dans les prochains articles.


Notes de ma part:
L'article fait une quarantaine de pages donc j'ai essayé de résumer au maximum donc il y a un risque de perte d'information pensez à aller à la source vous-même. C'est pas un article mais une montagne ce truc!

Définition d’endophénotype: un terme d'épidémiologie génétique utilisé pour séparer les symptômes comportementaux en phénotypes plus stables ayant un lien génétique

Résumé traduit:


Cet article passe en revue 95 publications (basées sur 21 échantillons indépendants) qui ont examiné les enfants présentant un risque familial de troubles de la lecture. Les auteurs rapportent que les enfants présentant un risque familial de dyslexie connaissent un retard de développement du langage lorsqu'ils sont nourrissons ou tout-petits. Au cours de la période préscolaire, ils éprouvent d'importantes difficultés dans les processus phonologiques ainsi que dans les compétences linguistiques générales et dans l'acquisition des bases de la compétence de décodage (connaissance des lettres, conscience phonologique et dénomination automatisée rapide [DAR]).
Les résultats sont mitigés en ce qui concerne la perception auditive et visuelle : ils ne semblent pas sujets à un développement moteur lent, mais l'absence de contrôle des comorbidités perturbe l'interprétation.
Les études longitudinales des résultats montrent que les enfants à risque familial qui répondent aux critères de la dyslexie présentent des déficiences plus graves dans le langage préscolaire que ceux qui sont définis comme des lecteurs normaux (mais aussi issus de familles à risque), mais que ce dernier groupe s'en sort moins bien que les témoins. De même, à l'âge scolaire, le risque familial de dyslexie est associé à une conscience phonologique et à des capacités de lecture et d'écriture nettement insuffisantes.
Bien qu'il n'y ait pas de preuves solides que les enfants présentant un risque familial aient été élevés dans un environnement très différent de celui des témoins, leurs parents ont tendance à avoir un niveau d'éducation plus faible et à se lire moins souvent à eux-mêmes. L'ensemble des résultats suggère qu'un déficit de traitement phonologique peut être conceptualisé comme un endophénotype de la dyslexie qui augmente le risque continu de difficultés de lecture ; à son tour, son impact peut être modéré par des facteurs de protection.

Résumé résumé:


Les auteurs ont fait une méta-analyse complète des études sur le développement langagier des enfants avec une histoire familiale de dyslexie. On note une plus forte proportion de retard des compétences linguistiques avec un pic sur le déficit phonologique dans la période préscolaire (avant 7 ans). On note également des difficultés en connaissance des lettres et conscience phonologique à ce sujet, les interventions de S. Dehaene sur le recyclage neuronal de la lecture est super intéressant. Dans les études longitudinales, les enfants ayant une histoire familiale de dyslexie attention, pas dyslexiques! présentent un déficit plus grand dans les prérequis à la lecture que les enfants tout venants mais moins graves que les enfants dyslexiques. Attention, impact de l’environnement familial avec niveau d’éducation inférieur et moins lecteur.
Les auteurs concluent donc que le déficit phonologique est endophénotypique à la dyslexie mais que son impact peut être modéré par des facteurs de protection.

CONTEXTE:


On sait depuis de nombreuses années que la dyslexie, comme d'autres
développement, est héréditaire (Olson, 2011) et que les troubles phonologiques qui la sous-tendent sont hautement ataviques (Olson, 2011) j'ai sorti le dictionnaire des synonymes.
Cependant, les mécanismes génétiques impliqués sont complexes et dépendent de l'influence combinée de nombreux facteurs génétiques ( Newbury, Monaco, & Paracchini, 2014). En outre, les gènes "généralistes", considérés comme codant pour les capacités cognitives générales, contribuent à l'étiologie de la dyslexie (Plomin & Kovas, 2005).
Les progrès dans la neurobiologie de la dyslexie nécessitent une compréhension plus fine du phénotype de la dyslexie qui clarifie ses principales caractéristiques développementales
et sa relation avec d'autres troubles. La présente étude contribue à cette compréhension.
En étudiant les compétences des enfants avant leur entrée dans la lecture, les auteurs pensent éviter de confondre les causes de la dyslexie de leurs conséquences.

QUESTION DE RECHERCHE:


Les auteures soutiennent l’importance de suivre une méthode longitudinale afin de mieux comprendre les mécanismes de la dyslexie afin de distinguer les causes et les facteurs associés. Les auteures se sont servies de 21 études ayant pondu 95 articles, toutes suivant l’approche behavioriste.

  • Hypothèse 1: La dyslexie serait plus fréquente dans les familles à risque (histoire familiale de DL) que dans les familles témoins ya plein de sous hypothèses encore mais après c’est plus un résumé

  • Hypothèse 2: La littératie diffère entre les familles avec une histoire de dyslexie et les familles témoins les auteures ne font pas d’hypothèse quant à la façon dont elles se différencient

  • Hypothèse 3: Caractère endophénotypique de la DL. Les auteures s’attendent à trouver des caractéristiques communes chez les enfants des familles à risque et les enfant prélecteurs DL pas encore diagnostiqués sur : reconnaissance des lettres, dénomination rapide automatisée et conscience phonémique je vais appeler cela le trifecta pour me faire gagner du temps (Caravolas et al 2013,) Les auteures s’attendent également à retrouver un retard langagier chez ces enfants (Ramus et al 2012, vive la France!)

  • Hypothèse 4: Les auteures font l’hypothèse de la corrélation entre niveau de compréhension oral et compréhension écrite (Keenan, Betjemann, Wadsworth, DeFries, & Olson, 2006)

  • Hypothèse 5: Les auteures s’attendent à ce que les protocoles d’entraînement du trifecta nommé précédemment améliorent les capacités de décodage mais sans impact sur la compréhension écrite à moins qu’un travail sur la compréhension orale ait également été introduit dans le protocole.

  • Et ben au boulot les cocottes!

    METHODOLOGIE:


    Les auteurs utilisent la méthode de méta-analyse PRISMA Preferred Reporting Items for Systematic Reviews and Meta-Analyses http://www.prisma-stateme

    Critères d’inclusion des études :
  • Traiter de données concernant des enfants avec une histoire familiale de DL et des enfants tout venant
  • Vérification du statut “à risque” soit par questionnaire soit par tests.
  • Comportent des données afin de pouvoir comparer les scores entre enfants à risques et tout venant.

  • Critères d’exclusion: Les études reprenant des scores issus d’autres études, échantillons trop petits et puis plein d’autres raisons logistiques.
    Au final restent 95 études.

    CONCLUSION:


  • Hypothèse 1: Prévalence de la dyslexie dans les familles à risque: La prévalence moyenne de la dyslexie chez les enfants à risque familial est de 45 %, avec des estimations allant de 29 % pour une étude néerlandaise à 66 % pour une étude anglaise. La prévalence est donc effectivement beaucoup plus élevée que dans la population tout venant. attention problème du cut-off selon les études ce qui fait varier les stats

  • Hypothèse 2: Différence de littératie dans les foyers. Il y a peu d’études sur ce thème mais à priori les parents dyslexiques lisent moins à leurs enfants et ont globalement un niveau d’étude moins élevé (à niveau socio-économique égal) SHOCKER!

  • Hypothèse 3: Endophénotypie de la dyslexie. Les hypothèses des auteures ont toutes été validées à savoir:
  • Différences développementales entre les enfants qui seront DL plus tard et les enfants tout venant au niveau de leur développement cognitif général. Concernant les enfants venant de familles à risque on constate de moins bonnes performances en traitement auditif mais équivalent en traitement visuel.
    Les enfants venant de familles à risque et développant ensuite une DL ont un développement langagier significativement plus lent (articulation, lexique et grammaire). Les enfants venant de familles à risque mais ne développant pas de DL ont des scores moins bons dans tous les domaines mais la taille de l’échantillon est trop petite pour pouvoir tenir compte des résultats. Ils auront cependant compensé leur retard à l’entrée en primaire (sauf sur les tâches phonologiques)
    Au primaire, les enfants venant de familles à risque futurs dyslexiques ou non ont tous des difficultés en décodage mais ceux ne développant pas de DL plus tard ont des performances normales en repérage de rimes et dénomination rapide. Ces derniers ont cependant de moins bonnes performances en décodage de mots, non mots et orthographe.
    Les difficultés des enfants venant de familles à risque mais non dyslexiques n’ont cependant pas de difficultés en compréhension écrite. Le vocabulaire et le niveau de langage permettant de préserver cette capacité et les enfants venant de famille à risque et non futurs DL finissent par compenser leur retard en vocabulaire, grammaire et phonologie.

  • Hypothèse 4: Relation prédictive entre développement cognitif et capacités de lecture
  • Le trifecta est un bon prédicteur pour les performances futures en lecture pour les enfants issus de familles à risque ou tout venant. Cependant, la correspondance graphème-phonème est un meilleur prédicteur sur le long terme pour les enfants issus de familles à risque sachant leurs déficits associés. On note également que le niveau de lecture des parents et le temps de lecture partagé a un fort impact sur le vocabulaire et la correspondance graphème-phonème des enfants échantillon non significatif cependant.

  • Hypothèse 5: Impact des interventions en lecture:
  • Les études présentent des échantillons trop petits et de mauvaise qualité. On suspecte un effet positif d’un travail spécifique de la correspondance graphème-phonème mais c’est pas folichon peu d’effet et ne tenant pas sur la durée.

    LIMITES:

    Recrutement vraiment hétérogène dans ce qu’on considère comme famille à risque selon les études.
    Défaut dans les mesures.
    Pas de screening des pathologies associées
    Pas de follow-up pour certaines études.


    APPLICATIONS AU CABINET:

    On peut suspecter une future dyslexie dès la maternelle mais n'allez pas vous emballer et poser un diagnostic hein!!
    L’anamnèse reste un de nos outils les plus puissants. Pensez à demander s’il y a une histoire de dyslexie familiale par ex.
    Effet préservateur du niveau de vocabulaire sur la compréhension écrite chez les enfants avec un faible niveau de lecture.
    Le déficit phonologique est le risque principal en cas d’histoire familiale de DL.
    Le développement langagier des enfants futurs dyslexique est moins bon que celui des enfants non futurs DL (quelle que soit leur famille d’origine) A priori, plus le retard est grand, plus grandes sont les chances de développer une dyslexie.
    Pour les enfants venant de familles à risque:
    Développement précoce de la dénomination des lettres = grosse baisse du risque de DL
    Pour les enfants avec une mauvaise connaissance des lettres à 5 ans:
    Moins de chances de DL si bonnes capacités phonologique ou en dénomination rapide.

  • > On voit donc toute la nuance dans les étiologies de la DL et qu’un enfant sans diagnostic de dyslexie peut tout de même avoir des difficultés significatives en lecture et des adaptations peuvent être nécessaires. La prise en charge doit être individualisée aux symptômes constatés. La prise en charge du langage oral restant très intéressante en cas de difficultés de compréhension écrite.